La caractérisation des crises chez le chien découle des observations chez l’homme. L’épilepsie chez le chien peut se manifester de plusieurs façons et découle de la localisation et de l’extension de la décharge électrique anormale dans le cerveau. Néanmoins, le déroulement des manifestations épileptiformes suivra toujours un schéma précis et propre uniquement à l’épilepsie.
Les manifestations épileptiformes : un déroulement en trois phases
Une crise typique/classique d’épilepsie se déroule en trois phases distinctes : la phase d’aura, l’ictus et la phase post-ictale.
La phase d’aura
La phase d’aura est une phase pouvant durer quelques heures à plusieurs jours. Chez l’homme, elle correspond à la perception de la survenue proche de la crise et se traduit par de l’anxiété, de l’agitation.
Chez le chien, cette phase n’est pas systématiquement observée, soit parce qu’elle est absente, soit parce que les signes sont trop discrets pour être détectés. Il existe de plus des différences entre les races. Par exemple, chez le Labrador, cette phase est dans la majorité des cas inexistante et la crise se déclenche sans signes annonciateurs.
Lorsque la phase d’aura est présente chez le chien, elle se caractérise par un changement de comportement de l’animal. Il peut sembler inquiet ou nerveux, rechercher le contact de ses maîtres ou au contraire fuir la présence humaine, s’isoler.
L’ictus
L’ictus est la deuxième phase de l’épilepsie et correspond à la crise en elle-même. C’est au cours de cette phase que se déclare l’épisode d’activité anormale du cerveau. Contrairement à la phase d’aura, sa durée est relativement courte : entre 1 et 5 minutes.
La phase post-ictale
La phase post-ictale correspond à la dernière phase de la crise. Il s’agit d’une phase de récupération consécutive à l’épuisement cérébral provoqué par la crise.
Dans la plupart des cas, elle se manifeste par un état de fatigue et de prostration, de confusion. Le chien peut aussi être désorienté, anxieux voire parfois agressif. D’autres chiens vont présenter une faim et une soif augmentées. Parfois, l’épuisement cérébral suite à la crise peut être plus important et engendrer des troubles de la locomotion et de l’équilibre, voire une cécité temporaire.
Selon les chiens, la phase post-ictale peut durer quelques minutes à plusieurs jours. Néanmoins, cette phase n’est pas systématique, certains chiens retrouvant un état normal directement après la crise.
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Les différents types de crises
Selon les individus, l’expression clinique de l’épilepsie peut être différente. On distingue généralement deux grands types de crises.
Les crises généralisées
Les crises d’épilepsie généralisées sont dues à une activité électrique anormale impliquant l’ensemble du cerveau et dont les manifestations vont concerner l’ensemble du corps de l’animal. Elles constituent l’expression prédominante de l’épilepsie idiopathique chez le chien notamment chez certaines races, telles que le Labrador. Elles sont relativement stéréotypées, en particulier pour un animal donné, c’est-à-dire que les signes cliniques observés sont assez constants d’une crise à l’autre. Des crises généralisées sont également possibles en cas d’épilepsie intracrânienne ou d’encéphalopathie réactive.
Crises de « grand mal »
Les crises généralisées sont souvent des crises dites de « grand mal » : des crises convulsives intéressant l’ensemble du corps associées à une perte de conscience.
Les manifestations cliniques sont généralement brèves, durant de quelques secondes à quelques minutes (moins de 2-3 minutes pour la majorité), mais semblent souvent plus longues pour le propriétaire.
La crise débute généralement par une perte complète de conscience, l’animal se couchant alors sur le côté. Il présente ensuite une activité motrice bilatérale intense. Dans 80 % des cas, il s’agit de crises de type tonique-clonique ou tonico-clonique consistant en la succession d’une phase tonique puis d’une phase clonique. Pendant la phase tonique, une contraction musculaire généralisée se produit et le chien peut présenter un opisthotonos (position avec les membres rigides et la tête rejetée en arrière). Au cours de la phase clonique, les membres présentent des mouvements rythmiques de pédalage, l’animal mâchonne ou claque des mâchoires.
Les stimulations du système nerveux autonome peuvent se manifester par une hypersalivation, une miction (émission d’urine), une défécation, une mydriase (dilatation de la pupille), une respiration irrégulière ou des apnées.
Tous ces signes cliniques ne sont pas systématiquement présents et de nombreuses variantes sont possibles, avec, là encore, des différences qui ont été mises en évidence en fonction de la race : certains animaux présentent des crises toniques-cloniques en conservant leur état de conscience, des crises uniquement toniques sont observées, ou plus rarement des crises uniquement cloniques… La crise peut également se traduire par une perte brutale du tonus musculaire (atonie) ou par des contractions musculaires brèves et localisées (myoclonie).
Lien vidéos
https://www.youtube.com/watch?v=4guYA4TU1VE
Crises de « petit mal »
Par opposition aux crises de « grand mal », sont également décrites chez l’homme des crises généralisées de « petit mal » ou crises d’absence, caractérisées par une perte de contact avec l’environnement, sans activité motrice anormale. Elles existeraient également chez les carnivores domestiques, mais sont mal documentées. Selon les auteurs, elles se manifesteraient par de brefs troubles de la vigilance ou bien par une altération de la conscience et un arrêt de la fonction motrice très courts qui n’entraînent pas forcément le décubitus de l’animal. Ces crises seraient rares et/ou sont difficiles à détecter à cause de leur brièveté et de la discrétion des signes.
Crises partielles ou focales
Les crises partielles sont la manifestation clinique d’un foyer épileptogène localisé. Une seule ou plusieurs zones du cerveau sont concernées. En fonction des régions cérébrales impliquées, les répercussions peuvent être motrices, comportementales et/ou concerner l’activité du système nerveux autonome. En général, ces crises durent également quelques minutes.
Certains auteurs qualifient ces crises partielles de simples si l’état de conscience n’est pas altéré, et de complexes dans le cas contraire.
Des crises partielles peuvent être rencontrées chez des chiens atteints d’épilepsie idiopathique, mais sont globalement plus rares que les crises générales convulsives. Des études rapportent qu’elles sont plus fréquentes pour certaines races et parfois même prépondérantes (caniche, english springer spaniel) (cf. Quels sont les chiens concernés ?). Elles seraient plus fréquentes chez le chat (cf Comment se manifeste une crise d’épilepsie chez le chat ?) que chez le chien, avec une plus grande variété des signes cliniques.
Ce type de crise est également souvent rencontré lors d’épilepsie structurelle ayant pour origine une atteinte intracrânienne localisée (tumeur, traumatisme, accident vasculaire,…).
Les manifestations peuvent consister en des contractions musculaires et des mouvements répétés d’un seul membre, des contractions musculaires de la face, des mâchonnements, une hypersalivation…
Les éventuelles modifications du comportement lors de crises partielles sont variées : baisse de la vigilance, peur, agressivité, hallucinations avec attaque d’objets virtuels ou chasse de mouches imaginaires (fly-biting) (cf. Le fly-biting chez le Cavalier King Charles), aboiements ou vocalises, miaulements, tournis (cf. Le tournis ou spinning du Bull Terrier), course sans but, isolement ou recherche de contact avec son maître, …
Ces crises partielles sont souvent moins caractéristiques que les crises générales convulsives et peuvent échapper aux propriétaires.
Selon les chiens, elles peuvent rétrocéder spontanément ou se généraliser secondairement par l’embrasement des deux hémisphères cérébraux.
Il semble en effet que lors de crises récidivantes, les régions voisines du foyer peuvent à leur tour devenir épileptogènes sous l’effet de stimulations répétées. Ce phénomène d’extension est appelé « effet feu de broussailles ». En outre, les EEG mettent fréquemment en évidence l’apparition d’une activité électrique anormale symétrique dans l’autre hémisphère cérébral. La création de ce foyer symétrique est appelée « effet miroir ». Chez le chien, les crises partielles évoluant en crises généralisées sont le type de crise le plus fréquent. Mais la phase de crise partielle pouvant être très courte, elle n’est pas souvent observée par le propriétaire.
Lien vidéos
https://www.youtube.com/watch?v=Zk5xoPX9cjk
État épileptique
La fréquence des crises peut être très variable d’un animal à un autre.
Lorsqu’elles sont séparées d’au moins 24 heures, elles sont dites isolées. S’il y a plusieurs crises sur une période de 24h séparées par une période de récupération (phase post-ictale) avec retour d’un état de conscience normal, ces crises sont dites groupées. Lorsque les crises se succèdent avec une fréquence élevée pendant plus de 20 à 30 min, sans réel retour à un état normal entre les crises, ou si la crise dure plus de 10 minutes, le chien est en état de mal épileptique ou status epilepticus. Cet état représente une situation d’urgence médicale et nécessite de conduire, sans délai, l’animal chez le vétérinaire pour une hospitalisation et un traitement rapide. L’état épileptique peut être rencontré lors d’épilepsie idiopathique et apparaîtrait plus fréquemment chez les chiens de grandes races. Certaines causes d’épilepsie structurelle favorisent également son apparition. Enfin, des études montrent notamment que si un chien est en status epilepticus, il a presque 3 fois plus de risques de souffrir d’une encéphalopathie réactive liée à une intoxication que d’épilepsie idiopathique.
Voir aussi